Deuxième extrait

C’est en titubant, avec le tournis dans la tête que les 5 compagnons arrivèrent dans le premier monde. Dès le début des ondoiements du miroir, un vent glacial les avait aspirés et propulsés à une vitesse vertigineuse vers un point lumineux où ils se retrouvèrent à dégringoler dans une succession d’escaliers sans marches ni paliers, sans rampes pour pouvoir s’accrocher, juste une étrange sensation d’avoir sous les pieds des degrés sur lesquels ils dérapaient, les yeux fermés car aveuglés par une vive lumière. Ils étaient au bord du vomissement quand la cadence effrénée commença à ralentir. Cillant des paupières ils virent alors prendre forme devant eux des meubles inconnus : un grand lit à baldaquin en courbaril, une console à pieds en crosse terminés par des griffes, une table à écrire au plateau surchargé de rouleaux de parchemins, des fauteuils au dossier violoné, une lourde armoire posée sur des supports en bigorneaux… et divers autres bibelots ou objets appartenant à la chambre où ils venaient d’atterrir.
Tout cela disposé dans une pièce dans laquelle flottait une forte odeur d’encens.
Turio ouvrit précautionneusement la porte d’entrée donnant sur un grand couloir. Il y passa la tête et fit signe à ses acolytes. La voie était libre. Après, c’est tout naturellement qu’ils se séparèrent pour prendre la direction correspondant, selon eux, à la fonction qu’ils avaient choisi d’infiltrer. Turio ne s’y trompa pas trop et ne tarda pas à faire sa première rencontre. Des pas précipités sur le dallage de terre cuite le firent tourner la tête ; face à lui se tenait une jolie jouvencelle aux boucles blondes et aux joues roses, à la recherche, elle aussi, des cuisines. Dans son empressement, elle le renversa presque, tendant vers lui un broc en argent au bec évasé :
─ Vite ! vite ! Il me faut du lait de chèvre pour la princesse Émeraude, pouvez-vous m’aider ? Si je ne le lui ramène pas vite, elle me battra ! C’est pour son bain !

Premier extrait -

Alix laissa retomber le pan du rideau de soie dans un léger bruissement. Se retournant vers son premier preux, il l’invita d’un large geste de la main à prendre place dans un des sièges disposés face à sa table à écrire tandis que lui-même se laissait choir de l’autre côté, dans un large et confortable fauteuil de bois blond aux formes arrondies.
─ Parfait ! Que t’ont dit d’autre nos espions ?
─ À peine le navire accosté, ils ont vu Wolfang descendre la coupée, accompagné de son chef chasseur-limier Arkhan. Tous deux sont allés présenter leurs respects au sénéchal Chrizator Abalor, avant de conduire à la geôle de la cité une prisonnière.
─ Une prisonnière ? Tiens donc !
─ Oui, mais je ne pense pas qu’elle puisse vous intéresser. Il s’agirait, dit-on, d’une maraude sans importance, que dis-je, une sorcière, une sorte de diseuse de bonne aventure. Wolfang l’aurait sans doute ramassée dans un de ces tripots dont il est familier.
─ Effectivement, je ne m’intéresse pas vraiment aux sorcières. Comment était-elle ?
─ Je l’ignore, c’est un détail qui ne m’a pas été donné.
D’un mouvement de la tête, Alix rejeta vers l’arrière une mèche brillante couleur de jais tombée sur son front et reprit avec un léger rire :
─ Eh bien soit ! J’irai donc honorer de ma présence le banquet dans lequel tous espèrent être invités chaque soir. Je pourrai, ainsi, tout en satisfaisant ma curiosité, faire plaisir à ma sœur, la princesse Théophanie et fêter comme il se doit l’arrivée de la fiancée qu’elle m’a choisie. Commençons par boire en son honneur une rasade de cervoise.
─ Vous ne semblez guère aimer votre future épouse…
─ Qu’a donc à voir l’amour dans tout cela ? On se marie tôt pour assurer sa descendance, avec toute cette stérilité qui nous atteint tous, avant même que nous soyons vieux, bientôt nous n’aurons plus aucun roi sur le trône du premier monde !

 Troisième extrait -

Alix bondit de son siège, les battements de son cœur s’accélèrent, et, prenant appui sur les accotoirs, se redressa de toute sa taille :
─ Lilith ? Vous parlez de Lilith ? Que lui est-il arrivé ?
La supérieure tomba à genoux devant lui :
─ Ils l’ont enlevée ! avoua-t-elle précipitamment.
Alix tapa violemment du plat de la main sur sa table à écrire faisant tressauter tous les objets se trouvant dessus :
─ C’est bien de cela qu’il fallait m’entretenir en premier ! Vous n’avez donc pas été capable d’assurer sa sécurité !
─ C’étaient de véritables brutes ! Même que duègne Odalia a été molestée puis brutalisée par l’un d’eux et voici le résultat :
Elle allongea le bras et désigna le visage de sa compagne.
Alix, ignorant le visage tuméfié, insista :
─ Mais à Lilith, que lui ont-ils fait ?
─ Ils l’ont juste hissée sur leur monture.
─ Expliquez-vous ! A-t-elle résisté ou non ? S’est-elle débattue ?
─ Rien de tout cela ! Nous n’étions pas très loin d’ici, à un trois chemins, celui situé au niveau de ce fromager qu’on aperçoit de loin tant il est grand. Vous ne pouvez le louper. À proximité il y a un village en gaulettes. Tous redoutent ce croisement sur lequel l’on dit tant de choses, car, dit-on, ce kapokier peut troubler vos idées et vous écarter de votre trajet initial. La preuve est que la jouvencelle a sans nul doute eu les pensées embrouillées car elle les a suivis sans opposer de résistance.
─ Sans opposer de résistance ? Vraiment ? Vous en êtes sûre ?
─ Oui, même qu’elle n’a pas perdu de temps à rester ramasser sa besace bleu ciel qui lui a échappé et est restée accrochée aux épines du tronc.
─ En effet, elle ne quittait jamais sa besace, c’est surprenant… murmura Alix, soucieux, elle n’aurait donc pas cherché à la récupérer…
─ C’est tout à fait cela, Votre Majesté. En fait, elle semble les avoir suivis de son plein gré et avoir été pressée de partir avec eux.
─ Comment étaient ces hommes ? S’agissait-il de rouquins ?

Présentation de l'ouvrage et commande

L’histoire reprend alors que le roi l’Authentique a lancé, du 7ème monde, ses chevaliers à la recherche de la fragile Lilith, enlevée par les chasseurs-limiers et ignorant toujours les circonstances mystérieuses de sa naissance.
Celle-ci va devoir braver de terribles dangers dans un monde inconnu : la tempête du triangle de cristal ; les cachots d’Aspégia ; la traversée de terres hostiles. Elle rencontrera un étrange messager sur les cendres d’un volcan et croira connaître l’amour… Son but : fuir le plus loin possible mais l’équipée envoyée à son secours va-t-elle retrouver sa trace ? Réussira-t-elle à traverser la cité des ombres ? À trouver une porte de sortie pour rentrer avec la captive dans leur monde ?
Ce nouveau tome nous entraîne à un rythme effréné dans un univers Moyenâgeux où l’espérance de vie dépasse les limites du possible mais où la stérilité gagne du terrain, où les convoitises, intrigues et perfidies animent le cœur des hommes.

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