Premier extrait

Le retour fut tendre. Il était attentif, prévenant. Tout nous paraissait merveilleux, nous étions si heureux !
Ce fut une semaine fantastique, le week-end passa très vite, trop vite, mais je n’avais plus peur de son départ, je savais que j’étais maintenant à la première place dans son cœur. Avant de partir il m’avait confié une mission, et quelle mission : préparer notre mariage.
Ce matin-là, il prit sa moto et partit travailler, mais, je ne le revis plus jamais. Deux heures plus tard, on m’apprenait son décès. Il avait été happé par un camion et était mort sur le coup…
Ne plus penser. Juste respirer. Oublier tout sentiment, se murer dans le silence pour ne pas hurler. Que dire ? Rien ne peut effacer cette injustice ! Alors ne laisser vivre que l’enveloppe, pour le reste…
Ce jour-là, je pris la décision de ne plus jamais aimer ! Puisque ça signifiait dire avoir mal, je ne voulais plus avoir à supporter ce poids. Je m’interdis tout sentiment.

Deuxième extrait

Nous voilà embarqués sur un autre chemin, celui du jeu et là j’ai bien l’intention de me venger, non mais ! On ne m’attaque pas comme ça ! Tu veux te faire les dents ? Je vais t’en donner moi, du mordant, promesse de femme ! Sur cette ultime pensée, je m’endormis la tête remplie d’idées plus ou moins tortueuses. Je l’adore celui-là (sourire)…
Ma tête est en ébullition elle fourmille de plans diaboliques, tout se bouscule, que faire, que dire, comment le provoquer, lui donner matière à réfléchir ? Je vais trouver. Ah, tu veux jouer ? On va être deux ! J’en jubile d’avance.

Ah, intellectuellement parlant, je vais pouvoir m’éclater. Je n’ai jamais autant souri de ma vie. Un regard à mon miroir et, ô miracle, une étincelle de joie est présente dans mes yeux. Le bonheur me va bien, je me sens belle, rayonnante, pour la première fois depuis des années. Un petit compliment ne tue pas et on n’est jamais mieux servi que par soi-même, alors je me décerne l’oscar du regard le plus vif de cette décennie. Nouvelle journée, nouveau bonheur. Bonjour toi dans le miroir, à ce soir, j’espère…

Troisième extrait

Je me débarrasse rapidement de mes vêtements, et joue les nymphes. La fraîcheur de l’eau me donne la chair de poule mais ce n’est pas grave.
Le soleil se promène sur ma peau, faisant courir ses longs doigts sur mes épaules. Faire partie de cette nature me comble de bonheur. Mes yeux se posent partout, s’enivrent de la beauté qui m’est offerte.
Un lézard se faufile entre deux pierres, dérangé par ma venue. Les arbres me saluent. Le bruissement de leurs feuilles me chantonne l’air du temps. Quelques carpes, énormes, nagent le long de la berge, elles ne sont même pas apeurées par ma présence. Une linotte chante accroché à un roseau.
Un regard lancé distraitement vers l’étang me provoque aussitôt l’envie irrésistible de piquer à nouveau une tête.
Je m’enfonce tranquillement dans l’eau, elle est fraîche sur ma peau réchauffée. Un pur délice ! Tourbillonnant comme une danseuse, je nage sans but, m’amusant d’un rien.

Quatrième extrait

Je suis l’heureuse propriétaire d’un morceau de paradis. Armée de balais, seau, produits d’entretien, j’astique, je brosse, je peins, enfin je n’arrête pas. Très souvent, j’ai la visite de René, il vient m’aider, me conseiller, on dirait qu’il a rajeuni et je vois dans ses mimiques qu’il revit.
Je disparais tous les week-ends, mon prétendant commence à s’en inquiéter. De plus, je suis de plus en plus fatiguée, mais rayonnante. Ça l’intrigue…
Un soir n’y tenant plus, il me téléphone, sous un prétexte quelconque. Je sens qu’il veut me demander quelque chose, mais je le laisse venir. Il « rame » pour essayer de savoir s’il a un rival ; tourne autour du pot et puis se lance.
Ne voulant rien dévoiler de mes projets, je lui demande d’être patient encore un peu.
« Non je n’ai personne de nouveau dans mon cœur, enfin pas un homme, rassure-toi. »
Il me fait confiance, je le sens dans sa manière de me parler, du coup il arrive même à plaisanter.